Un appel à communications est lancé pour le colloque international bilingue (français et anglais) «Études et exercices polysémiques autour d’une oeuvre: La France apportant la foi aux Wendat de la Nouvelle-France». Ce colloque se tiendra le 29 octobre 2021, à l’UQÀM.
Les propositions de communication (400 mots), en français ou en anglais, devront être accompagnées d’une biographie succincte (150 mots) et envoyées avant le 31 mai 2021 à Pierre-Olivier Ouellet et Marianne Longtin. À la suite du colloque, les conférenciers seront conviés à soumettre leur communication en prévision d’une publication.
Le tableau à l’étude, La France apportant la foi aux Wendat de la Nouvelle-France, constitue le point de rencontre de cet événement, qui permettra d’investiguer différentes voies de recherche dont les suivantes, données à titre d’exemples et de manière non exclusive:
- les représentations littéraires et visuelles du Nouveau-Monde
- la critique postcoloniale à l’aube de la nature de la représentation
- l’iconographie et les pratiques de représentation du pouvoir royal
- l’historiographie des rapports entre autochtones et occidentaux
- les lectures non-occidentales de l’objet d’art
- la présentation muséale, le discours de l’exposition et la médiation de l’oeuvre selon ses lieux (historiques et actuels) d’accrochage
- la mise en abîme et ses symboliques
- le prosélytisme religieux au XVIIe siècle
Le colloque international est organisé par l’UQÀM, en partenariat avec le Laboratoire numérique des études en histoire de l’art du Québec de l’UQÀM et le Pôle culturel du Monastère des Ursulines.
À propos
«Dans le cadre des activités du Laboratoire numérique des études en histoire de l’art du Québec, ce colloque s’intéresse aux multiples interprétations et discours possibles à partir d’un tableau appartenant au Pôle culturel du Monastère des Ursulines, et aujourd’hui présenté dans les salles du Musée national des beaux-arts du Québec (Canada), soit La France apportant la foi aux Wendat de la Nouvelle-France. De facture française et peinte vers 1666, l’oeuvre plutôt méconnue – bien que maintes fois reproduite dans les ouvrages consacrés aux arts de la période coloniale française en Amérique du Nord – a souvent été interprétée telle une allégorie de la France, sous les traits d’Anne d’Autriche (1601-1666), offrant un tableau à un Huron-Wendat (Gagnon Lacroix 1983; Trudel 1984; Deslandres 2003; Lacroix 2012). En tenant compte de la réalité coloniale française du XVIIe siècle ainsi que du mouvement de Contre-Réforme catholique, il est également admis que la peinture reflèterait les pratiques missionnaires des Jésuites auprès des populations des Premières Nations en Amérique du Nord. La mise en abyme du tableau répondrait alors aux stratégies de conversion de cette époque, misant sur l’idée de rendre visible par l’art l’invisible des réalités spirituelles. Comme l’indique un passage du Journal des Jésuites daté du 20 juin 1666 et mis en évidence en 1983 par les historiens de l’art François-Marc Gagnon (1935-2019) et Laurier Lacroix, l’oeuvre aurait aussi une finalité historique puisqu’il s’agissait de faire un «tableau qui marque (comment les Wendat) ont embrassé la foy». Ainsi, il semblerait que toute la composition et la mécanique de l’oeuvre tenteraient de synthétiser les conceptions de la conversion par l’image pratiquée par les religieux au cours des 1ers contacts avec les autochtones (Gagnon 1975).
Si l’oeuvre peinte a ainsi fait l’objet de recherches et d’écrits présentant de solides argumentations, elle semble encore pouvoir se livrer à différentes approches, problématiques et lectures permettant de jeter de nouveaux éclairages sur ses multiples composantes, tant matérielles, formelles, iconographiques et historiques. De fait, telle une oeuvre ouverte pouvant être soumise à autant de regards distincts, cette peinture du XVIIe siècle présente encore, à notre avis, une part de mystère et une richesse interprétative sousexploitée. Par exemple, en 1997, l’historien de l’art Joseph Monteyne examinait le contexte de réalisation de l’oeuvre en tenant compte des changements politiques et religieux dans la colonie au moment de la reprise en main de la Nouvelle-France par le roi Louis XIV. Plus récemment, en 2020, l’article de l’historien de l’art Pierre-Olivier Ouellet abordait la peinture afin de mettre en relief ses multiples aspects diplomatiques liés tant au contexte politique qu’à son iconographie. Plus encore, différents exercices de recherche et de rédaction menés avec des groupes d’étudiant.e.s de 1er cycle en histoire de l’art, à l’Université du Québec à Montréal (UQÀM), révélaient une multiplicité de pistes et de discours tout autant prometteurs, touchant à des questions relatives aux notions de pouvoir (religieux, royal, économique, colonial, postcolonial, etc.), de spiritualité (principalement catholique et autochtone) et d’espace (territoire colonial, Mère-Patrie, lieux représentés, symbolique de la composition, mise en abyme, etc.).
Fort de ces prémisses pointant la nature polysémique du tableau La France apportant la foi aux Wendat de la Nouvelle-France, il nous semble désormais essentiel d’investir à nouveau cette peinture dans le cadre d’un colloque international bilingue (français et anglais). Les études et échanges autour de l’oeuvre permettront la mise en place d’un véritable exercice postmoderne misant sur la multiplicité des discours autour d’un même objet. Un objet qui, de surcroît, ne s’offre pas comme le résultat de la pratique d’un artiste déjà encensé par la discipline de l’histoire de l’art ni comme le sujet d’une forte attention médiatique. Loin de ces aspects détachés de la «grande» peinture, cette oeuvre se présente plutôt comme l’occasion d’une plongée empreinte de curiosité, de questionnements et d’hypothèses, au coeur même de nos perceptions, de nos intérêts et de nos connaissances.»